Quel est l’agenda climat de l’Union Européenne à la veille de la COP29?
The Nature Letter on Sunday #013 - L’agenda européen sur le climat
Les ministres de l’environnement se sont réunis cette semaine pour confirmer le mandat de négociation de l’Union Européenne pour la COP29 qui aura lieu en Azerbaïdjan à Bakou entre le 11 et le 22 Novembre.
Nous avions évoqué dans un article précédent la priorité de cette COP autour de la question du financement de la transition. Cette conférence doit aussi travailler sur les questions de résilience et d’adaptation. Nous pouvons ainsi partager une analyse du World Economic forum sur les points clefs de cette COP29 et récapituler les objectifs essentiels :
Le financement de la transition et la mise au point du NCQG (« New collective Quantification Goals »)
Le point central est la négociation des engagements financiers pour la transition.
Cela doit aussi inclure une meilleure inclusion des financements privés.
Le besoin de pouvoir s’accorder sur des nouveaux objectifs quantitatifs plus ambitieux pour le NCQG qui avaient été établis initialement avec l’accord de Paris.
L’amélioration de l’article 6 sur les Crédits Carbone et leur mise en œuvre opérationnelle
Les crédits carbone sont un mécanisme important pour permettre de diriger des fonds depuis l’économie fossile vers l’économie neutre en carbone.
Le marché de ces crédits est néanmoins entaché de difficultés techniques et de déviations incluant parfois des excès et même du « Green Washing ».
La COP29 doit donc revoir comment rendre ce marché des crédits plus fiable et plus crédible.
L’augmentation du «Loss & Damage Fund»
Ce fonds initié durant la COP28 est conçu pour permettre de protéger et préparer les pays en voie de développement qui sont les plus exposés aux conséquences du réchauffement climatique.
Il s’agit donc de muscler ce fonds lors de la COP29 pour tenir compte des nouvelles estimations malheureusement plus pessimistes des dégâts à venir liés au changement climatique.
L’amélioration de l’adaptation aux effets du changement climatique
La mise en place des « National Adaptation Plans » est un jalon très important. La COP28 a initié la demande pour les pays de mettre en place ces plans d’adaptation d’ici 2030.
Le renforcement et le partage de ces NAP’s est un objectif important dans le contexte où les températures continuent malheureusement de monter. Il est clair que l’objectif initial de limiter le réchauffement à 1.5 degré ne pourra plus être tenu.
Dans ce contexte, les européens ont cette semaine affirmé leur soutien aux objectifs d’accélération mais nous pouvons noter les points d’attention suivants :
L’Europe demande l’inclusion de nouveaux donateurs parmi les pays émergents et tout particulièrement la Chine et pose cette participation comme un pré-requis de la négociation.
Les européens s’appuient sur l’évolution des capacités économiques de chaque pays et de leur contribution relative aux émissions de gaz à effet de serre pour réclamer cette participation.
Les pays européens ont confirmé cette semaine un package de contribution de l’Union européenne qu’ils sont donc prêts de leur côté à mettre sur la table à Bakou.
Les pays européens souffrent en revanche de conditions budgétaires et économiques difficiles en ce moment notamment en France et en Allemagne.
Les marges de manœuvre de négociation sont donc limitées sur le plan financier pour les européens qui pourraient de ce fait avoir des difficultés à jouer leur rôle traditionnel d’entraînement dans les COP.
Les États Unis sont à la veille d’une élection cruciale le 5 novembre qui pourrait avoir bien évidemment des effets importants sur la politique climatique des USA.
Nous pouvons constater également que cette COP29 se déroulera à un moment charnière pour l’agenda climat européen qui subit en ce moment des évolutions contrastées :
Sur un plan positif :
Les nouveaux commissaires au climat et à la compétition ont confirmé les semaines dernières les engagements pris cet été par Ursula Van der Leyen après les élections européennes. (cf un article publie après l’élection de Ursula Van der Leyen’)
Ils se sont vus notamment confier dans leurs lettres de mission l’objectif de mettre en place le « Clean industrial plan » . ( cf les éléments clefs de ce plan )
Sur un plan plus incertain :
Les forces politiques plus populistes et moins écologistes du nouveau parlement européen défient certains points du « Green deal » européen.
Les défis des gouvernements et parlementaires nouvellement élus concernent tout particulièrement deux pans essentiels du « Green Deal » que sont les transports et le chauffage.
Le nouveau système de trading d’émissions, le ETS2, est par exemple critiqué par certaines forces politiques car il doit imposer à partir de 2027 une taxe sur les transports et les combustibles fossiles faisant porter un poids économique sur la population.
L’objectif de la commission de vendre exclusivement des véhicules verts en 2035 est lui aussi critiqué compte tenu du prix élevé des véhicules électriques pour les populations.
L’industrie automobile elle même fait du lobbying pour revoir les conditions des taxes qui doivent lui être imposées dès 2025 (cf mon article précédent sur les défis pour la voiture électrique en Europe).
Enfin, la commission a décidé de retarder d’un an le pacte sur la déforestation qui prévoyait des règles strictes de contrôles de la déforestation dans les pays exportant des denrées agricoles en Europe (café, cacao, soja, bœuf). Ce délai est le résultat des pressions des pays producteurs mais aussi des forces politiques craignant un renchérissement des produits agricoles pour les consommateurs.
En conclusion , nous sommes à un moment charnière et fragile en matière de gouvernance du climat sur le plan politique européen et mondial à moins d’un mois de l’ouverture de la COP29. Nous vous tiendrons informés sur ces sujets critiques pour la gouvernance dans la conduite des efforts de notre transition climatique.
Bonne semaine
Philippe
Https://o2nature.substack.com/